La somme de nos choix
“We’re all faced throughout our lives with agonizing decisions, moral choices. Some are on a grand scale, most of these choices are on lesser points. But we define ourselves by the choices we have made. We are, in fact, the sum total of our choices.”
– Dr Levy dans Crimes et Délits, de Woody Allen.
J’ai grandi sans casque dans une station de ski de l’Oisans. Pendant que mes parents abreuvaient de vins chauds les touristes du moment, je slalomais entre des piquets avec l’objectif — un peu absurde — d’arriver en bas la première. Le reste du temps, comme la plupart des autres enfants du coin, j’arpentais les reliefs et les chemins environnants, évoluant à ma guise entre l’école et le restaurant familial, le club des sports et le bar de ma grand-mère, le ruisseau du dessus et le ravin du dessous. Le divorce de mes parents, l’année de mes douze ans, a mis un terme abrupt à mes rêves de gloire sportive, ainsi qu’à cette insolente liberté que je tenais pour acquise. En Belgique, oùma mère, ma sœur et moi avons atterri, mon horizon s’est aplati. Rien ni personne ne me semblaient y avoir de quelconque relief. Alors, puisque j’échouais à convaincre ma mère que tout ceci était une erreur, j’ai attendu de pouvoir partir.
Bac en poche, l’été de mes dix-sept ans, j’ai fourré quelques vêtements, photos et peluches dans des valises et j’ai levé les voiles. Ma vie, à présent, allait être le résultat de mes propres décisions. Cette perspective de liberté reconquise me remplissait d’espoir et de confiance. L’idée que je n’y sois pas prête, qu’elle puisse être à double tranchant ou que je ne sache tout simplement pas qu’en faire m’avait à peine effleurée…